"Amaury da Cunha n'a guère de goût pour les paysages. C'est aux "choses" qu'il s'intéresse, au sens le plus large du terme : hommes et papiers journaux, vieilles dames et manteaux abandonnés, boîtes aux lettres. Et ces choses, pense-t-il, ne se révèlent qu'arrachées à leur paysage, à leur décor familier. Il s'agira donc presque toujours, pour le photographe qu'il est, de décadrer son sujet, c'est-à-dire de le débarrasser du cadre familier qui bride ses possibilités d'expression propre. Parfois, il n'en retient qu'une partie, voire un simple fragment. L'angle et le moment sont inattendus, l'objet ainsi capturé entièrement vulnérable. De ces choses désemparées, il tire une beauté et une émotion inédites, devant lesquelles il s'incline. Ce paradoxe fait toute la valeur de son travail : s'il dépouille son sujet, c'est pour mieux en révéler la grandeur secrète. […] Les actrices d'autrefois qui nous refusent l'accès de leur loge, prétendant n'être "pas visibles", sont en réalité extrêmement dignes d'être vues. Et celui qui, bravant l'interdit, pénètre dans leur antre avec un coeur suffisamment pur, un regard suffisamment innocent, en ressort tout chargé d'une émotion nouvelle, celle que procure la saisie de l'expression authentique, sans fards. Cette vérité rebattue, connue depuis longtemps par les photographes à la mode, la force d'Amaury da Cunha est de la généraliser, de l'appliquer à la réalité toute entière, jusqu'à sa dernière chaussette". (Jean-Baptiste de Froment / Extrait du texte d’introduction Outre un cahier photo, le livre présente en seconde partie un recueil d'écrits brefs et incisifs (notes, réflexions, choses vues…) du photographe).
Amaury da Cunha est né à Paris en 1976. Après des études de lettres modernes à la Sorbonne, il intègre l'École nationale de la photographie d'Arles dont il sort diplômé en 2000. Son travail oscille entre la photographie et l'écriture (Pantalon, 2006). Il est |